Voici le prélude fluffique de la campagne, en espérant que ça vous mette bien dans l'ambiance !
Fluff de la campagne, Introduction !Il régnait dans la taverne un vacarme assourdissant que seuls couvraient les voix les plus fortes et les sons d'instruments de musique crachant une mélodie rendue informe par le tumulte.
Une véritable brume issue des fumées des brûleurs de tabac, des pièces de viandes rôties, et de la large cuisine d'où sortaient des vociférations qui auraient pu faire penser à une dispute conjugale au pays des ours rendaient la visibilité difficile au delà de deux mètres. Pourtant, dans ce brouhaha incessant, les serveuses avançaient avec célérité d'un pas rendu sûr par l'expérience. La plupart étaient humaines, bien qu'une naine ou deux fasse son apparition quand il fallait porter un plateau de plusieurs dizaines de kilos. La bière coulait à flot dans les gosiers des clients rieurs qui faisaient preuve d'une bonne volonté certaine pour ne pas provoquer de bagarre. Troggar le nain ne se faisait pas d'illusion : il finissait toujours par y en avoir une. Ses gardes, pour la plupart recrutés chez ses neveux et cousins, étaient généralement assez dissuasifs pour empêcher que tout ne parte en vrille de façon trop irrattrapable, et le brasseur-tavernier était fier que jamais une mort n'ait dû être déplorée en son établissement. Mais qu'était le pouvoir dissuasif d'un nain face à quelque litres de la bière d'un autre nain ?
Sur l'un des murs était affiché un tableau présentant l'ancêtre de Troggar, et peu de monde y faisait attention. "Crédit est mort pendu" affiché juste à côté rencontrait bien plus de succès.
- Si t'es pressé, va planter ton houblon toi-même, raclure ! gueula une naine occupée à gérer la très nombreuse clientèle au comptoir.
Troggar sourit. Sa nièce maîtrisait le métier comme si elle avait eut deux siècles d'expérience, elle qui n'avait que soixante ans, la jeunette.
Parmi la clientèle, on trouvait de tout. Mercenaires, fermiers, marchands itinérants, aventuriers, cartographes, chasseurs de trésors, soldats en campagne ayant eu la chance d'échapper à leur officier supérieur pour venir ici le temps d'une demi-nuit... Humains, nains, ogres... Même quelques elfes remontant des contrées marines pour aller vendre leurs produits exotiques au cœur du continent venaient séjourner ici. Troggar était bon avec eux : il aurait put les renvoyer après leur avoir botté le derrière, mais les autorisait à dormir dans l'étable pour le double du prix demandé pour un humain. C'était de sa part une largesse d'esprit que les membres de sa race ne lui avaient jamais pardonnée. Peu lui importait, les affaires marchaient bien, les humains poussaient le vice jusqu'à l'apprécier, et sa taverne ainsi que sa brasserie étaient particulièrement réputées au sein de cette région de Mantica.
C'est peut-être ce qui expliqua la présence de l'étrange individu encapuchonné qui conversait le moins fort possible avec un capitaine mercenaire à l'air patibulaire, dans l'un des seuls lieux de la grande salle où il était possible de s'isoler.
Il y eut bien quelques personnes pour remarquer qu'un morceau de parchemin usé était échangé le plus discrètement possible contre une bourse manifestement bien garnie, mais personne ne réagit en conséquence. Les chopines pleines de bière étaient plus intéressantes qu'une quelconque intrigue.
Le capitaine partit, laissant une des pièces de la bourse sur la table pour régler sa consommation, puis il s'en fut, trop bête pour s'empêcher d'afficher un air content de lui.
Troggar fit grise-mine, ce que son beau-frère ne manqua pas de remarquer.
- Mauvais payeur ?
- Si c'était le cas, je n't'aurais pas attendu, je serais déjà en train de lui botter le joufflu, fiotr ! C'est plutôt le vieux au fond qui me tarabuste le grenier.
- L'a point l'air terrible...
- Des jours qu'il est là ! Et à chaque fois il parle avec un chef de ci ou un commandant de ça, puis il se fait payer pour un morceau de papier. Le même, avec les mêmes traces d'usures, aux mêmes endroits...
- Un vendeur de fausse carte au trésor ?! Fiotr ! Mais c'est drôle ça ! s'esclaffa le nain assez fort pour attirer quelques regards.
- Notre chez nous qui devient un repère d'escrocs, tu parles d'une réputation.
- Nous le foutrons dehors pour de bon ce soir, mon frère. Mais ne t'en fait pas trop. Si quelques crétins désœuvrés ont été assez bêtes pour acheter sa camelote, c'est de leur faute. Nous n'y sommes pour rien. Brââââ ! N'y pense plus ! La soirée est encore loin d'être finie, lampe donc une autre chopine avec moi, on se lève aux aurores pour brasser demain !
Le projet sembla alléchant au maître brasseur, mais deux clients par trop éméchés commencèrent à s'empoigner en renversant plusieurs chaises au passage.
- Il y avait longtemps, soupira Troggar.
- Cela me manquerait si ça n'arrivait pas, s'esclaffa son beau-frère avant de se précipiter pour calmer les soulards.
Le maître-brasseur s'autorisa un sourire. Mais il gardait aux tripes la sensation que quelque chose n'allait pas.
***
- Il en a été fait selon vos ordres, dit une voix sombre et éraillée dans l'obscurité. On a finit par me chasser de la taverne. C'est dommage, car elle était populaire, mais j'ai écoulé des dizaines de ces cartes à travers le continent ces six derniers mois. Toute la roture, la racaille mercenaire, les nobles désœuvrés et les aventuriers inconscients ont entendus la rumeur. J'ai prêté l'oreille aux racontars et il se dit que des expéditions se préparent de partout. Basiléa, Ophidia, Golloch, la Dame Verte en personne aurait été intriguée ! Nul doute que tout cela se passera comme vous le souhaitiez.
-
Je te le souhaite, répondit une voix trop grave et résonnante pour être humaine.
Cela t'a pris une éternité.- Recopier seul toutes ces cartes fut long, maître, répondit le vieillard en tremblant, serrant fort contre son cou le médaillon qu'il portait et qui luisait si fort en fumant au contact grésillant de sa peau. Il fallait qu'elles soient toutes exactes.
-
Je le sais ! répondit la voix inhumaine en résonnant dans la grotte isolée où se trouvait le vieillard. N
'oublie pas que rien de tout cela n'est de ton fait ! Ce plan est le mien ! - C'est... une évidence... maître, répondit l'homme en saignant des yeux et des oreilles, luttant pour ne pas s'évanouir. N'ayez aucune crainte... Tout le monde sait désormais que la légendaire Forteresse d'Obsidienne est réapparue ! Tout le monde va converger vers ses trésors ! Et quand ils seront arrivés au but, nous n'aurons plus qu'à tout prendre, comme vous l'avez dit ! Arrêtez ! Pitié !
La voix se tut, mais la douleur ne s'arrêta que bien longtemps après. Et sur le continent des hommes au cœur plein d'espoir préparaient leurs armées. Une fois de plus, à la frontière de l'Abysse infernal, la guerre allait faire entendre ses cris.